Quand Auto Delta devint Alfa Romeo

Dans ce grand dossier sur l’Alfa Romeo TZ2, un des chapitres les plus importants est à n’en pas de douter la fusion entre Alfa Romeo et Auto Delta. Une histoire humaine, politique et passionnée. Récit de soixante ans d’histoire.

Auto Delta est créée en 1963 par Ludovico Chizzola et Carlo Chiti à Udine, non loin de Venise. Les deux compères sont respectivement concessionnaire automobile Innocenti / Alfa Romeo et ancien ingénieur Ferrari. Installés dans les locaux de Ludovico Chizzola, ils œuvrent ensemble, avec comme objectif premier la construction de voitures de course.

Très rapidement, la structure travaille pour Alfa Romeo, avec la Giulia Sprint 1600 GTA. C’est alors qu’apparait leur première création : la Giulia TZ première génération. Mais Auto Delta ne sera pas créateur de cette TZ. Fabricant du modèle, Auto Delta récupère l’exploitation “compétition” des TZ, sous la direction d’Alfa Romeo.

Le début de la légende : Giulia Sprint 1600 GTA, première bombinette des ateliers Autodelta.

Avec cette TZ et les Giulia, le constructeur milanais souhaite améliorer son image, la rendre plus sportive après des années sans compétition officielle, des année, dédiées à la relance industrielle de la marque. Car la Guilia roule, mais sans soutien ou support de la marque, grâce aux privés et amateurs. Avec cet investissement presque secret sur Auto Delta, la marque au biscione se retrouve avec la TZ et la Giulia sur des courses telles que les 24 heures du Mans, 1000 km du Nürburgring ou encore sur la Targa Florio. Le succès est au rendez-vous, avec bien des victoires. Et Auto Delta aux manettes.

Dans les ateliers Autodelta de Settimo Milanese, les Giulia sont en bonne place.

Manœuvres politiques et nouveaux objectifs

Lors du lancement de la TZ, Auto Delta fonctionne comme une société complètement distincte, indépendante d’Alfa Romeo. Un fait qui déplait à la direction de la marque milanaise, qui ne voit pas d’un bon œil qu’une entreprise aussi indépendante gère des programmes aussi importants. C’est ainsi qu’après divers accords, Auto Delta est absorbée par Alfa Romeo fin 1964, elle devient Autodelta, en un seul mot. L’année suivante, cette dernière exige que sa société fille se rapproche du siège milanais ainsi que des pistes d’essais de la marque, à Balocco.

Balocco, 1966, Autodelta vient à Balocco pour ses essais, à une heure de Settimo Milanese.

Le siège d’Autodelta est ainsi transféré à Settimo Milanese, en banlieue de Milan, avec Carlo Chiti à la tête. Chizzola, second fondateur de la structure originelle refuse de quitter Udine et quitte l’entreprise. Carlo Chiti se retrouve donc seul à la tête de Auto delta, avec Alfa Romeo comme grand patron. C’est dans ces conditions que nait la TZ2, lancée en lors du Salon de Turin 1965. Une naissance difficile, entre effort industriel, volonté sportive et enjeux politiques.

C’est lors de la courte vie de la TZ2 que l’histoire de Autodelta décolle, même si ce modèle emblématique est stoppé deux ans après son lancement. Alfa Romeo a en effet assez de “simples” victoires de classe remportées, sur les plus beaux théâtres européens, certes. La marque italienne souhaite passer un cap et demande à son bras armé Autodelta, avec toujours Chiti à la tête, de passer la deuxième vitesse. Objectif : monde.

L’Alfa Romeo Giulia GTA est déjà présente depuis 1965, avec la compétition client et la classe Grand Tourisme, mais c’est sur le Sport prototype que Alfa louche. Le programme principal est lancé, avec l’endurance et la Tipo 33. Avec cette dernière, c’est simple : Alfa veut tout remporter.

Objectif : Monde pour la Tipo 33, ici aux 24 Heures du Mans 1972. – Alfa Romeo Tipo 33 T3 – Helmut Marko & Vic Elford – Photo DPPI

1966, la société Autodelta est liquidée pour créer le département course Alfa sous le nom “Reparto Corse Alfa Romeo.” Mais cela ne sera que du vernis, les autos seront toujours créées, fabriquées, exploitées aux couleurs Autodelta pendant de nombreuses années, portant toujours le petit triangle bleu et blanc aux côtés de Quadrifoglio verde.

1968, Autodelta joue à 100% son rôle et engage quatre Alfa Romeo T33/2 sur la Targa Florio, fournissant aux équipes clientes un soutien technique.

L’aventure Tipo 33

De 1967 à 1977, cinq modèles de la Tipo 33 se succèdent. Une carrière longue de 10 ans, un record ! Parmi ses principaux faits de guerre, la Tipo 33 remporte la Targa Florio en 1975 avec Arturo Merzario et Nino Vaccarella, mettant véritablement en liesse la Sicile tout entière ! Ce millésime 1975 marquera le premier titre pour Alfa Romeo en Championnat du monde des voitures de sport (World Sportscar Championship), qu’elle confirmera deux ans plus tard. Au Mans par contre, jamais la Tipo 33 ne viendra à bout des Porsche et autres Matra Simca…

Nino sur ses terres, dans la descente du village de Collesano, Targa Florio 1975. Victoire, VV Nino !

La F1 en eau de boudin

A la suite des titres WSC Constructeurs en 1975 et 1977, Autodelta passe un nouveau cap lorsque Alfa Romeo l’autorise à s’impliquer à 100% sur la F1. C’est la consécration pour Chiti, la F1 Alfa Romeo 177 fait ses débuts lors du Grand Prix de Belgique 1979. En 1985, l’équipe clôture son programme F1, avec comme meilleur résultat une 6ème place en fin d’année en 1983. On se demande si cela valait vraiment le coup de s’embêter avec la F1.

Dans un même temps, fin des années 70 et début des années 80, Autodelta développe les Alfa GTV6 groupe A et groupe N, début des années 80, pour le rallye et le circuit.

1979 sera l’année du retour d’Alfa Romeo en F1, via Autodelta

La fin d’une époque

Il faudra attendre le début des années 2000 pour revoir le logo Autodelta en course. Lors du lancement de l’Alfa 156, un programme sportif est prévu, en supertourisme européen, le FIA ETCC. Si la voiture est créée par N Technology, filiale sportive du groupe Fiat, c’est l’écurie spécialement créé et nommée AutoDelta Squadra Corse qui exploite les belles 156 aux livrées Selenia. Il s’agira d’un programme officiel de l’usine Alfa Romeo.

La 156 ETCC sera la dernière Alfa à porter les couleurs Autodelta…

Depuis, Autodelta est aux abonnés absents… Alfa Romeo ayant choisi Sauber pour son programme F1. Peut-être qu’un jour, le triangle bleu et blanc reverra la lumière du jour. Pour le moment, les derniers endroits où on peut l’apercevoir est le musée Alfa Romeo à Arese et à Balocco, sur la base d’essais Alfa Romeo / FCA group. Dans cette base fermée au public et ultra surveillée, le service compétition historique d’Alfa y a son pavillon. Pour avoir eu la chance de le visiter, je vous souhaite cette chance…

Bonne route,
Jean-Charles

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